Information complémentaires
L’instrumentalisation du mawlid par les houthis est de nos jours une chose évidente. Un énorme mawlid ayant réuni plus d’un million de personnes avait fait le tour des réseau sociaux en 22019, depuis les internautes ne cessent d’en parler.
ce reportage pro houthis insiste sur le fait que ce mawid est une démonstration de force. un message envoyé « aux alliés » pour leur dire que le Yemen est prêt à combattre tout armée d’alliée qui s’attaquera à lui.
Transcription de la vidéo
L’instrumentalisation du Mawlid ne se limite pas aux simples discours prononcés pour l’occasion. Pour mieux comprendre cela, il faut s’intéresser aux différents courant de l’islam et leur position vis-à-vis du Mawlid.
D’un côté nous avons les chiites qui célèbre en pompe non seulement le mawlid du prophète Mohamed mais aussi le mawlid de sa fille Fatima, de son cousin et gendre Ali et de ses petits-fils, fils de Fatima et Ali, Hassan et Hussein et bien d’autre mawalid.
De l’autre côté, nous avons les sunnites divisés en deux groupes : la plupart des musulmans sunnites qui célèbrent le mawlid, et n’y voient aucune contradiction avec l’islam, et les salafistes ou les wahhabites, principalement présent dans l’Arabie saoudite qui considèrent que le Mawlid est une innovation religieuse à combattre. Les érudits et prédicateurs du salafisme en Arabie saoudite sont quasi unanime à ce sujet. A commencer par les hautes personnalités religieuses, comme les deux abdulanziz, ibn baz et al cheick, respectivement, ancien et actuel Grand mufti d’Arabie saoudite ou encore ibn uthaymin, célèbre membre du Conseil des oulémas saoudiens. Ils affirment tous que le mawlid est une innovation et insiste sur le fait que ce sont les fatimides chiites qui sont à l’origine de cette fête. Du côté des autres sunnites, il n’y a rien dans le mawlid qui va à l’encontre de l’islam, et donc, rien ne peux justifier son interdiction. C’est ce qu’affirme entre autre Al-qaradhawi et Ahmad Altayyib, respectivement, président de l’Union internationale des savants musulmans et grand cheikhs de la mosquée al-Azhar.
Si le conflit sunnite-chiite se traduit souvent de nos jours par une rivalité entre l’Arabie saoudite et l’Iran, il faut croire que les positons de l’Arabie saoudite sur les innovations religieuses notamment le Mawlid divisent au sein même de la famille sunnite, et opposent les salafistes aux restes des musulmans sunnites. Dans quasiment tous les pays du monde, il existent des salafistes qui s’opposent au mawlid, notamment les salafistes formés gratuitement dans les universités saoudiennes.
L’Iran n’est pas insensible à cela. Il cherche à exploiter ceci pour son intérêt comme on peut lire dans un article de propagande publié dans un site iranien spécialisé dans l’étude et le suivi des activités du wahhâbisme :
Les sunnites et les chiites célèbrent la naissance du prophète et Daesh et les wahhabites l’interdisent.
Le titre est clairement une exploitation du conflit sunnite-chiite dans la rivalité qui oppose l’Iran à l’Arabie saoudite. Les auteurs auraient pu écrire l’Iran et le monde musulman fête la naissance du prophète mais Daesh et l’Arabie saoudite l’interdise. Ça a le même sens.
Cet article est composé en trois parti : la première partie explique le contexte alors que la deuxième partie, la plus longue, intitulé :
مفتي السعودية يحرم الإحتفال بالمولد النبوي الشريف ويعتبره « بدعة »
Le mufti de l’Arabie saoudite interdit le mawlid du prophète et le considère comme une innovation.
Cette partie confronte l’avis du grand mufti de l’Arabie saoudite aux avis de grands et ancien érudits sunnites qui autorisent le mawlid comme Ibn Hajar al-Asqalani (1372-1449) et Ibn al-Jawzi (1116-1201).
L’article se termine ensuite par un petit paragraphe intitulé :
الاحتفالات بالمولد النبوى الشريف عند اتباع أهل البيت عليهم السلام لا تختلف عن أهل السنة
Les célébrations des mawlids chez les partisans de la famille du prophète ne diffèrent pas de celle des sunnites.
On remarquera que l’auteur de l’article fait exprès d’éviter le mot chiites ici faire passer de d’un attachement à la famille du prophète. Bref, l’article envoi un seul message, L’Iran aime le prophète Mohamed et partage cet amour avec le monde musulman tandis que l’Arabie saoudite partage la même idéologie avec Daesh et interdisent le mawlid.
Au plus haut niveau, le régime iranien célèbre chaque année ce qu’il appelle la « Semaine de l’unité islamique » qui va du 12 du mois de rabi’ Al-awwal, date de naissance de Mohamed selon les sunnites, au 17 du même mois, date de naissance retenu par les chiites.
Cette semaine a été décidé par l’ancien guide suprême de la Révolution islamique Rouhollah Khomeini à partir d’une idée originale de l’actuel guide Ali Khamenei comme on peut lire dans son site web officiel qu’il aurait eu cet idée pendant qu’il était en exil dans la ville de Iran-Shahr. Etonnamment, l’objectif de cette semaine est de montrer l’unité des chiites et sunnites, mais cela fait plus de 33 ans que l’initiateur de cette semaine occupe le plus haut responsabilité politique et religieux en Iran et les sunnites ne bénéficient pas de lieu de culte dans la capitale iranienne et ne pouvaient pas célébrer librement la naissance du prophète, au moins jusqu’en 2018.
Aljazeera se demande dans un article non signé publié le 25 novembre 2018 ce qui se cache derrière le fait que les sunnites célèbre le mawlid à Téhéran ?
Cité par aldjazeera, le député iranien Ahmad Bahrami affirme qu’aux cours des cinq derniers siècles, Téhéran n’a pas connu de telles célébrations sunnites, et que l’organisation de telles célébrations après tant de siècles successifs met en évidence, d’une part, leur forte présence, et d’autre part, renforce le sentiment d’appartenance des sunnites à leur patrie.
L’article parle entre autre de l’absence de lieu de culte mais aussi de l’ouverture de la municipalité ses derniers années pour répondre aux problématiques rencontrés par les sunnites. Cité dans l’article, le député Ali Motahari critique l’inexistence de lieu de culte sunnite dans la capitale et affirme que cela fait longtemps que l’idée de l’ouverture d’une mosquée sunnite a été évoquée sans résultat.
Si les sunnites ne fêtent pas librement la célébration du mawlid à Téhéran, au Yemen c’est par la force que la population est obligé par les houthis à y prendre part, physiquement et financièrement.
Video : المساء اليمني | احتفالات الحوثي بالمولد النبوي.. مناسبة للجباية وتعظيم السلالة
Soutenu par l’Iran dans leur guerre contre l’Arabie Saoudite, les houthis cherche par ses célébrations en pompe à renforcer leur présence dans les territoires du Yemen et à faire une démonstration de force. Chose qui expliquerait la présence de l’ambassadeur de l’Iran auprès des houthis Hassan Erlo dans la célébration du mawlid
L’instrumentalisation du mawlid est moins flagrant du côté de l’Arabie saoudite où les célébrations étaient systématiquement interdites sous l’intervention de la police religieuse où ce qui est connu par le « Comité pour la promotion de la vertu et la prévention du vice ».
Pour mieux comprendre le contexte : rappelons qu’au lendemain de l’invasion et l’annexion du Qatar par l’Irak le 2 aout 1990, l’Arabie saoudite a accentué sa collaboration avec les États-Unis jusqu’à mettre en place l’opération « bouclier du désert » le 6 aout 1990 afin de préserver l’Arabie saoudite de tout éventuel attaque irakien.
De nombreux prédicateurs saoudiens étaient contre cet opération et ont enflammée les mosquées par des discours anti-américain. Ils réclamaient l’arrêt immédiat de la collaboration avec les États-Unis. Ceci accentua le mouvement connu sous le nom « الصحوة الاسلامية », l’insurrection islamique, qui continua de monter en puissance au point de devenir gênant pour le gouvernement saoudien. Pour faire barrage à ce mouvement qui diffusaient son message à travers les sermons de vendredi et les discours dans les mosquées, il fallait un discours islamique alternative.
Stéphane LACROIX affirme que deux mouvements ont bénéficié, après 1994, d’un certain soutien du pouvoir politique dans le but selon ses termes « de faire pièce à la Sahwa ». Le mouvement qui nous intéresse et celui des soufis. D’après LACROIX le soufisme hedjazi est entré « dans une relation plus apaisée avec les autorités, marquée par l’autorisation accordée à Muhammad ‘Alawi al-Maliki de reprendre ses cours ». Notons que Muhammad ‘Alawi al-Maliki est un érudit soufis mecquois auteur d’un livre qui soutenait la légalité de célébrer le Mawlid
Couverture
« حول الاحتفال بذكرى المولد النبوي الشريف » « À propos de la célébration de l’anniversaire du Prophète ».
Ses cours qu’il donnait dans la mosquée de la macque, comme son père avant lui, ont été interdit car ils n’étaient pas en conformité avec la position officielle soutenu par le régime.
D’après la CROIX, non seulement le régime avait autorisé ses cours pour faire barrage au mouvement de la sahwa mais « Certaines des restrictions qui pesaient sur les activités des soufis, notamment quant à l’organisation des mawlids, sont en partie levées ».
Même si les restrictions liées à la célébration du mawlid sont levés pour des raisons de survie de la monarchie, il semblerait que le régime saoudien n’est pas prêt à célébrer le mawlid ou à laisser la population la fêter comme bon leur semble.
Le 18 avril 2007, le quotidien arabe basé à Londres Alquds a publié un article selon lequel la police saoudienne détenait deux jeune sous prétexte d’avoir supervisé l’organisation d’une célébration de mawlid.
Fouad Ibrahim, journaliste saoudien installé au royaume unie, auteur de plusieurs livres dont : les chiites en Arabie Saoudite et le salafisme djihadiste en Arabie Saoudite, explique dans une intervention dans la chaine chiite al-thakalayne qu’après des longues années à combattre le mawlid ça serait difficile pour le l’Arabie saoudite de faire volteface et se mettre à célébrer le mawlid.